C’est l’anniversaire de mon père. Il aurait eu cent-vingt-et-un ans. J’y ai pensé car, maintenant que nous avons fait refaire les peintures, je nettoyais et rafistolais les cadres des photos de famille que je dois replacer dans l’entrée. La sienne date de l’été 1940. Elle est prise à Nouméa. Il vient de rejoindre la France libre. Avec Félix Broche. Ces deux jeunes capitaines sont à l’époque les seuls officiers d’active du Pacifique appartenant aux armes combattantes à se rallier. Broche est tombé à Bir-Hakeim en 1942. Mon père est resté en Nouvelle-Calédonie pour faire face aux menaces d’invasion japonaises. Il n’est vraiment pas pour rien si le drapeau français a continué à flotter sur l’île. Il serait triste, amer et surtout en colère, s’il voyait l’effrayant chaos qui règne là-bas aujourd’hui. Temps gris. Mal fichu. J’ai raccompagné Amélie au train. Oh, que je n’aime pas quand elle s’en va.