Le temps file déjà. Il a fait grand soleil. Nous avons installé le théâtre de marionnettes au jardin. Les filles ont répété un moment avant de nous présenter un spectacle où il était question d’une princesse enlevée par un diable et d’un chevalier combattant des monstres pour la délivrer. Du grand classique. Ca me rassure, ces canevas d’histoire qui traversent les générations. Cela efface doucement les années et l’âge. Georgette et René sont venus déjeuner à la maison. La grande sœur, le petit frère. Elle : quatre-vingt-douze ans, lui : quatre-vingt-trois ans. Elle l’écoute parler en faisant de petits hochements de tête désapprobateurs comme s’il disait toujours des bêtises. Et pas seulement lorsqu’il raconte aux gamines qu’il s’est déjà couché sur une planche à clous ou qu’il a traversé des braises pieds nus sans se brûler. Malle des Indes et femme coupée en deux. Il nous a fait un vrai numéro de fakir de music-hall. C’est pas vrai, a dit Valentine.