Claire m’a fait un cadeau. Une photo, encore. Elle a été prise en septembre 1983 au chemin de Feïsoulade, sur les hauteurs de Grasse, près du Pilon, une grande maison de famille qui appartient maintenant à un des oncles d’Amélie. C’est elle, Amélie, justement, que l’on voit sur ce cliché en noir et blanc. Debout, arrêtée dans sa promenade sur un sentier bordé de chênes verts. Elle a le visage tourné vers l’objectif. Rieuse dans l’esquisse. Un rien gênée, à peine, comme si elle ne savait pas très bien quelle attitude adopter. On lui a dit : Regarde-moi, fais un sourire. Elle se tient les épaules en arrière, les bras ballants. Au poignet droit, elle porte une montre genre Swatch, à l’autre un petit bracelet plat en métal. Elle est chaussée de tennis en toile, probablement bleu marine, à semelle de caoutchouc blanc et à lacets de coton, les chaussettes roulées sur les chevilles. Elle porte un assez large bermuda de toile tenu par une ceinture de tissu tressé. Un sweat shirt, enfin, qu’on imagine dans les orange avec des inscriptions sportives. Elle a les cheveux ramenés vers l’arrière en une grosse queue de cheval. Elle a les yeux très vifs. Elle est très jolie. Elle est une petite fille. Elle a presque douze ans. J’ai glissé l’épreuve dans mon agenda. Passé, présent, futur : je m’emmaillote dans les temps. Le ciel était tout bleu sur les collines. Nous sommes allés chez le boulanger avec Marion et Jérôme. Du pain au levain, des gressins, une pissaladière. Après le déjeuner, nous avons pris le café sur la terrasse. Véronique et François sont passés dire bonjour. Nous, nous bouclions les bagages. Nous avons enveloppé les oiseaux et leur globe de verre dans des mètres et des mètres de papier bulle. Installé le tout dans une gigantesque valise. Ne pas la heurter. Ne pas la coucher. Le voyage dans le train du retour jusqu’à Paris a été un peu inquiet. Pas de casse… Demain il faudra renouveler l’opération jusqu’à Carolles.