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dimanche 1 septembre 2024

Dimanche 1er septembre 2024. 16h10.

J’ai envoyé mon papier sur le Carole Martinez à Jean. J’ai mis beaucoup plus de temps à l’écrire que je ne le pensais. Le roman est labyrinthique et la chronique a vite fait de se perdre si elle cherche à en suivre les tracés. J’ai pensé aux Carceri d’inventione (1760) de Piranèse tant, dans la narration, tout se croise, se recroise, disparaît à la vue, Des passerelles, des échelles, des ponts, des cordes, des poulies. Je suis resté à l’orée du texte. Dans Dors ton sommeil de brute, les rêves des enfants du monde font advenir d’apocalyptiques désastres. Où est la réalité ? Je me suis juste contenté d'essayer de donner l’envie d’y aller voir.

samedi 31 août 2024

Samedi 31 août 2024. 21h30.

Petite carte à Apolline envoyée à Mexico. J’ai pris la résolution de lui adresser un mot par semaine. La régularité palliera le long délai d’acheminement. Il ne me reste plus beaucoup de temps avant que mes courriers ne la laissent indifférente. C'est qu'elle grandit. Elle va avoir treize ans en novembre. Déjà.

vendredi 30 août 2024

Vendredi 30 août 2024. 19h30.

Au Pilon, avant de partir, j’avais arraché deux surgeons des vieux arbres qui ombrageaient l’arrière de la maison. Un tilleul et un érable sycomore. Tous les deux largement centenaires. Nous les avons trimballés pendant bien huit jours, enfermés dans des bouteilles remplies d’eau. Je les ai mis en pot, sans grand espoir, à notre arrivée à Carolles. Pourtant de minuscules bourgeons ont fini par apparaître la semaine dernière et ce matin de petites feuilles se sont ouvertes. Je me suis senti très heureux. Je vais veiller sur eux, cet automne, cet hiver. Au printemps je les installerai dans de plus grands contenants. Ce sera encore un peu de l’enfance d’Amélie, du souvenir de ses grands-parents (de sa grand-mère Maya surtout) qui grandira au jardin. Nous avons toute une pépinière sentimentale. Il n’est guère de plantation chez nous qui ne soit intimement liée à un lieu, un moment, au souvenir de quelqu’un. Il faut que je dresse la liste.

jeudi 29 août 2024

Jeudi 29 août 2024. 20h00.

J’ai pris pas mal de notes sur Dors ton sommeil de brute, le dernier roman de Carole Martinez. Finalement Jean me commande un papier pour le prochain numéro du Monde des Livres. C’est une fable curieuse, inquiétante, sur les pouvoirs étranges et terribles de l’enfance. Sur « le rêve et la vie ». Comment ne pas penser à Nerval et à son Aurélia ? Je l’écrirai demain. Je suis parti balader la chienne en fin d’après-midi. Les prés sur la falaise étaient blancs d’ombellifères. Premières mûres dans les ronciers. J’avais heureusement emporté un sac. Ramassé un bon kilo. Je les ai mises à macérer dans le sucre et le citron. Tout à l’heure, je ferai des confitures.

mercredi 28 août 2024

Mercredi 28 août 2024. 18h50.

Virginie m’avait écrit un petit mot après la mort de mon oncle. Je viens juste de lui répondre. J’ai adressé la lettre à Mexico. Elle est encore en France pendant une semaine ou deux, mais je ne veux pas me tromper entre les dates et les adresses. Le courrier pour le Mexique met un mois pour arriver. Cela permet d’éprouver un peu le temps et la distance. Virginie a bien saisi à quel point cette disparition m’a ébranlé. Mon oncle Georges a été une figure essentielle de mon enfance. Quelqu’un que j’admirais profondément. J’étais attentif à ce qu’il disait, à ses silences. Il m’a appris la confiance et la patience. Quand j’avais huit ou neuf ans, je voulais devenir prêtre, comme lui. Je lui dois cette flamme de Foi, vacillante, fragile, mais qui ne s’est jamais éteinte. Et je lui dois aussi mon amour de la littérature, celui du XVIIIe siècle français (il connaissait intimement l’œuvre de Rousseau), de la botanique, des sciences naturelles. Il est de ceux qui ont éveillé mon âme. Je suis allé à Lille pour ses funérailles le 5 août. J’étais le seul de la famille. Mais qui reste-t-il aujourd’hui ? Ma cousine Josette, fatiguée. D’autres cousins, perdus de vue depuis longtemps et les générations d’après, dispersées, indifférentes, inconnues. La messe, dans la petite chapelle de la Maison Saint-Jean, sa résidence pour prêtres âgés, était présidée par Mgr Gérard Coliche, l’ancien évêque auxiliaire, et concélébrée par trois prêtres. Dans l’assistance, des pensionnaires et des membres du personnel de l’établissement, quelques anciens paroissiens, des sœurs du monastère de la Plaine où il avait été chapelain. Face à l’autel, le cercueil en bois clair. J’ai lu un passage du Livre de Michée. Avec quoi me présenterai-je devant le Seigneur ? Il avait émis le désir d’être incinéré. Ses cendres ont été répandues le lendemain au crématorium d’Herlies sur le carré de pelouse que l’on appelle « jardin du souvenir ». A l’issue de la cérémonie, un des célébrants m’a remis son calice. Celui de chaque consécration, de chaque élévation, pendant soixante-cinq ans de sacerdoce. On m’a permis d’aller dans sa chambre récupérer quelques souvenirs. Il n’y n’avait pas gardé grand-chose. Je suis reparti avec un crucifix, une statuette de Don Quichotte, un presse-papier, un ouvre-lettres, un chapelet cassé qui était, je crois, à ma grand-mère... J’ai ramassé aussi des notes manuscrites à l’écriture un peu tremblée (il recopiait essentiellement des passages de livres), de la correspondance éparse, dont mes propres lettres. J’ai été brûler ces pauvres papiers tout à l’heure dans le fond du jardin.

Mercredi 28 août 2024. 10h30.

Marie a eu quarante ans. C’était il y a une minute, ce matin. Elle est venue passer la fin de semaine dernière à Carolles. Elle revenait de son second voyage en Angleterre et en Irlande « à la découverte du royaume de Logres ». Un grand périple arthurien qu’elle a commencé l’été 2023 depuis la Bretagne. Un mois à chaque fois. Cette année, elle rentrait par Jersey. Je suis allé la chercher à l’arrivée du bateau à Carteret. Elle est repartie avec Amélie dimanche soir. Je réalise qu’on se voit bien peu. Quelques jours ici une ou deux fois par an. Un déjeuner ou un dîner à Paris de temps en temps. Elle est bien secrète et je ne suis pas très bavard.

mardi 27 août 2024

Mardi 27 août 2024. 15h00.

Je devrais être train d’écrire un papier sur le récit de Clémentine Mélois, sur le roman de Xavier Patier aussi. J’aurais dû appeler Jean au Monde. Il m’avait demandé en juillet un portrait de Carole Martinez. Mais comme j’en avais déjà rédigé un en 2015, je lui avais proposé un « Mots de passe », cet exercice qui consiste à évoquer une œuvre avec des mots-clés. Il ne m’a pas répondu. Je ne l’ai pas relancé non plus. La liste de ce que je dois faire et que je ne fais pas s’allonge désespérément chaque jour. C’est pire qu’hier et mieux que demain pour paraphraser L’éternelle chanson de Rosemonde Gérard. Mon malheureux livre est enfoui lui aussi dans cet engourdissement. Pas une seule ligne qui vaille la peine. Je m’étais pourtant mis en jachère pour y travailler. Je n’ai rien rendu au Monde pendant presque six mois, de la rentrée de septembre à celle de janvier. Ça n’a été que du temps perdu. Perdre mon temps est ma meilleure matière. Fugit irreparabile tempus. D’une certaine manière, cela ne parvient même plus à m’angoisser. Je repense (encore) à Jerome K. Jerome : Accumuler le travail est devenu chez moi presque une passion ; mon bureau en est rempli, à tel point qu'il n'y a plus de place pour en mettre davantage. Il me faudra bientôt faire bâtir une annexe. Et je prends soin de mon travail, aussi. Une partie de celui que j'ai à présent chez moi est en ma possession depuis des années, et il n'y a pas dessus la moindre trace de doigt. Je suis très fier de mon travail ; je descends de temps à autre pour l'épousseter. Personne ne tient son travail en meilleur état de conservation que moi. Au printemps j’avais découvert qu’un certain Albert-Michel Rouleaux s’était attelé à une traduction de My life and times, les souvenirs de J.K.J. parus en 1926, un an avant sa mort. Nous avons eu un peu de mal à entrer en contact, mais il m’a très gentiment adressé le texte qu’il avait auto-édité. On peut regretter que personne ne l’ait publié. C’est un travail attentif, fin, et surtout d’une grande fidélité, d’une vraie proximité. Je lui ai adressé un petit rameau du cyprès qui ombrage la tombe de l'écrivain au cimetière d’Ewelme. J’en avais cueilli deux trois en 2014, l’été où nous étions allés chercher Camille à sa pension anglaise de Malvern. Nous nous sommes échangé deux lettres et je dois dire que je suis particulièrement heureux de partager avec quelqu’un ce compagnonnage littéraire et sensible. A moi d’entretenir la correspondance. Sinon, l’été a filé. Vite. Emmanuel, après avoir longtemps hésité, s’est finalement décidé à réunir parents et amis pour célébrer les quatre-vingts ans qu’il aura en octobre. Pour l’occasion, Marcus avait réservé le Pilon, la grande maison familiale de vacances fin XIXe installée sur les hauteurs de Grasse, où chacun, des parents d’Amélie, à ses oncles et tantes, à ses cousins, conserve une foule de souvenirs. La bâtisse avait échu en héritage à un oncle d’Amélie. Depuis sa mort, elle est la propriété d’une de ses filles qui la loue, vacances, noces et banquets, se réservant juste une dépendance pour elle. Tout est inhabité. Débarrassé. Pourtant, il était troublant de voir que les uns, les autres, emportés par leur mémoire, retrouvaient au détour d’un couloir, d’une volée de marches, à l’ouverture d’une porte, à celle d’une fenêtre, en regardant les arbres, des bribes d’intime, des tressaillements du passé. Et la grande maison vide bruissait doucement de ces ressouvenances. Amélie était particulièrement émue sans vouloir trop en laisser paraître. Le témoin passe aussi, j’ai vu mes nièces avides du moindre détail, de la plus petite anecdote, et replier en elles toutes ces images et ces évocations. La soirée de fête a été belle. Chaleureuse, émouvante. Nous étions bien une centaine. Je m’étonne que cela ne m’effraie plus. Mes « débuts » dans la famille d’Amélie se sont passés justement au Pilon. C’était le mariage de sa cousine Pauline. Mon Dieu qu’ils étaient nombreux. Je ne connaissais personne. J’étais épouvanté. Nous étions sur la fin du séjour lorsque j’ai appris la mort de mon oncle Georges dans sa maison de retraite pour prêtres à Lille. Quatre-vingt-treize ans. Nous étions allés le voir, Amélie et moi, il y deux ans, de retour d’Houplines où vivait ma grand-mère Mamoÿ avant la guerre de 14-18. C’était pour mon livre… Nous sommes remontés par Uzès pour rendre visite à mon oncle survivant, René, mon parrain. Il est le dernier des enfants d’Angèle et de Joseph. Le dernier des quinze. Quatre-vingt-quinze ans en décembre.

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mercredi 13 décembre 2023

Jeudi 7 décembre 2023. 20h30.

En somme, vous faites le mort, m’avait dit un jour Mme Lefrère.

mardi 12 décembre 2023

Mercredi 6 décembre 2023. 18h40.

Avec des poèmes élagués comme des béquilles, traverser d’un bout à l’autre le terrain vague encombré d’horloges fortifiées, de cloison mentales, d’esquilles d’âge, de regards croulants, pour déboucher hors de soi, tel un somnambule vigilant, en plein cœur de lacunes. Lacunes, c’est le titre du recueil que Paul Valet publie au Mercure en 1960 et qui commence ainsi. J’ai remis la main dessus tout à l’heure. Il n’y a pas de hasard. Lacunes. Je ne fais plus rien. Je ne tiens pas mon journal, je n’écris pas mon livre, j’ai laissé tout mon courrier à l’abandon : je ne réponds plus. Lacuna, le trou. Je suis tombé dedans. Je suis au fond du puits de mélasse dont parle le Loir dans Alice avant que le Chapelier et le Lièvre de Mars n’essayent de le noyer dans la théière.

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mercredi 22 novembre 2023

Jeudi 12 octobre 2023. 6h30.

Je me suis souvenu aussi des missiles irakiens, les scuds, tirés sur Tel Aviv et Haïfa début 1991 pendant la guerre du Golfe. On craignait qu’ils soient chargés d’ogives chimiques. La première victime, je crois, avait été une petite fille qui avait étouffé sous le masque à gaz que ses parents paniqués par l’attaque lui avaient mis pour la protéger. Cette histoire tragique, effrayante, absurde, m’avait fait penser à ce que David Rousset rapporte dans Les jours de notre mort. A Birkenau, les déportés de l’équipe du Sonderkommando chargés de retirer les cadavres de la chambre à gaz avaient découvert une fillette vivante dans la masse des corps enchevêtrés. Elle avait été coincée entre ses deux parents. Leur "creux" avait formé une poche d’air étanche. Le kapo bien sûr avait averti les S.S.. L’un d’eux l'avait tuée d’une balle de revolver.

Mercredi 11 octobre 2023. 22h00.

Pas de mots. Aucun ne vient. Mais ce n’est pas de mon interminable désert d’écriture dont il s’agit. Non. Aucun mot n’est assez juste, aucun mot n’est assez fort pour dire l’horreur qui s’est abattue sur Israël, sur les Juifs, samedi dernier. Près de la bande de Gaza, des hordes de Palestiniens du Hamas ont attaqué les kibboutz, déferlé sur un festival de musique. Ils ont massacré hommes, femmes, enfants, vieillards avec une sauvagerie inouïe. Ils ont atrocement violé des adolescentes, égorgé des bébés, brûlé vifs les gens pris au piège de leurs maisons, supplicié, torturé. Ils se sont pavanés avec les cadavres de leurs victimes, filmant leurs exactions avec jubilation, riant de leur kermesse sanglante. Plus d’un millier de morts. Ils sont partis avec près de deux cents otages dont une trentaine d’enfants. Des petits. La moitié a moins de dix ans. Le plus jeune n'a que dix mois. Certains ont vu leurs parents assassinés devant eux. J’ai repensé à ce petit garçon de quatre ans dont parle Odette Daltroff, cette jeune assistante sociale internée au camp de Drancy. Tout seul, si atrocement seul, il répétait, au moment de monter dans l’autobus qui l’emmenait avec d’autres pauvres mioches perdus vers la gare du Bourget d’où allait partir leur convoi pour Auschwitz Maman, je vais avoir peur, Maman, je vais avoir peur.

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Mercredi 20 septembre 2023. 23h50.

Amélie m’a invité Chez Georges, rue du Mail. Elle savait que cela me ferait plaisir. J’avais envie depuis longtemps que nous y dinions ensemble. C’est le seul restaurant qu’ait gardé Jean Gabriel de Beuil qui, avant, dirigeait aussi le Bistrot de Paris rue de Lille et Chez René, boulevard Saint-Germain. Plus, Chez Fred, boulevard Péreire, Chez Savy, rue Bayard... Un vrai petit empire. Il s’est passé, je crois, de bien sombres histoires de famille et d’argent pour qu’il ne conserve plus que cette adresse-là. Il m’a reconnu tout de suite. Cela faisait pourtant plus de dix ans qu’il ne m’avait pas vu. À l’époque, j’allais souvent au Bistrot de Paris. J’aimais réserver la table 44, près du bar, surplombant la salle. L’endroit n’a plus grand intérêt aujourd’hui. C’est bien chez Georges. Andouillette, foie de veau, chénas. Dans le brouhaha des conversations. Merci Amélie.

Mardi 19 septembre 2023. 17h00.

J’ai soixante-huit ans. Et ça ne me fait rien. Rien du tout. Ça glisse. Je glisse.

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dimanche 16 juillet 2023

Vendredi 14 juillet 2023. 23h50.

Pique-nique en bateau sur le lac. Tout le monde s’est baigné. Sauf moi. Il y a longtemps que m’est passée l’envie de me jeter à l’eau. Pour être franc, je me suis toujours un peu forcé pour faire comme les autres. Plus maintenant. Jerome K. Jerome a écrit quelques belles pages à ce sujet dans Trois hommes dans un bateau. Je m’y retrouve tellement… En ce qui me concerne, je décide immanquablement, quand je suis encore à Londres, que chaque jour je me lèverai matin pour aller faire un plongeon avant le petit déjeuner ; et j’ajoute religieusement à mon bagage un maillot et une serviette de bain. Je choisis toujours des maillots rouges. Je me plais bien en maillot rouge. Cela me va au teint. Mais quand je me retrouve sur les lieux de ma villégiature, ce bain matinal n’a plus pour moi (mais plus du tout !) le même charme que lorsque j’en rêvais en ville. Au contraire, je me sens tout à coup d’humeur à traîner au lit jusqu’au dernier moment, et je finis toujours par n’en sortir que pour prendre mon petit déjeuner. Une fois ou deux pourtant mon courage a triomphé : je me suis levé à six heures et demie, habillé à la va-vite, et, serviette et maillot sous le bras, je me suis mis vaille que vaille en chemin. Je n’en garde pas un bon souvenir. Il semble qu’à chaque fois on ait mis de côté spécialement pour moi un petit vent d’est singulièrement coupant. On dirait même qu’on a pris soin de faire remonter en surface tous les cailloux pointus et qu’on a aiguisé les rochers avant de dissimuler à ma vue leurs arêtes sous une mince couche de sable, et qu’on a fait se retirer la mer à trois kilomètres, ce qui m’oblige à patauger, tout grelottant, dans quinze centimètres d’eau. Et quand je parviens enfin à une profondeur raisonnable, l’eau est glacée et franchement infecte. Une énorme vague m’enlève et m’envoie valdinguer le plus brutalement du monde en plein sur un roc qu’on a mis là exprès pour moi. Et avant que j’aie pu pousser le moindre « Aïe ! Ouille ! » et faire le compte des membres qui me restent, voilà la vague qui se retire en m’emportant au large. Frénétiquement, je me mets à nager vers le rivage, me demandant si je reverrai jamais foyer et amis, regrettant de n’avoir pas été plus gentil avec ma sœur cadette quand j’étais petit. Et c’est à l’instant même où tout espoir me quitte qu’une autre vague, déferlant, me ramène brutalement sur le sable où elle me plaque comme une étoile de mer. Je me relève, m’ébroue, me retourne... et découvre que les profondeurs où je viens de lutter désespérément avec la mort, voisinaient les soixante centimètres. Je repatauge jusqu’à la plage, me rhabille et m’en retourne, piteux, vers l’hôtel. Et là, si d’aventure on me demande : « Alors, ce bain ? », je répondrai bien entendu : « Tout à fait délicieux ! » J’ai travaillé un peu à la chronologie du livre, relu des documents sur la Grande Guerre dans l’Indre. Dîner (spectacle) pendant le feu d’artifice d’Annecy.

samedi 15 juillet 2023

Jeudi 13 juillet 2023. 23h45.

Comme l’année dernière, c’est la première étape des vacances. Comme l’année dernière, nous profitons quelques jours de l’hospitalité généreuse de Virginie et Marcus. Toutes les filles étaient là (Camille est arrivée le soir de Mexico, via Paris et Genève). J’ai trouvé Victoria et Valentine incroyablement changées. Seize et dix-huit ans. Mon Dieu, comme il est bien loin le temps où je leur lisais des histoires le soir, celui où elles attendaient mes lettres. Celui de toute leur enfance attentive et curieuse. Aujourd’hui, très peu de livres, et leur correspondance se cantonne à des photos, à de très courts messages sur les réseaux sociaux. Elles sont emportées par la brise insouciante de leur jeunesse. C’est tant mieux pour elles. Quelque chose de nouveau commence. Là, je n’ai plus à leur tenir la main. A vingt-deux ans, Camille, après ses années d’études en biologie au Canada, cherche encore sa voie. Elle a traversé des chagrins d’amour dont je sais bien qu’il ne faut jamais les prendre à la légère. Que vont-elles devenir ces trois-là ? Mon inquiétude est à l’aune de l’infinie tendresse que je leur porte depuis toujours. Comme je vieillis. Reste Apolline, ma filleule qui entre (déjà) en cinquième. Elle est vive, enjouée, avide d’apprendre et de comprendre. J’ai tant à faire encore avec son bel âge. Et au-delà bien sûr. J’ai à cœur mes engagements à son baptême, le 28 juillet 2012 dans la petite église de Veyrier. Dîner sur la terrasse au soleil couchant. Ici Amélie se trouve en heureuse famille. Son bonheur simple est tellement beau à voir.

Mercredi 12 juillet 2023. 21h40.

Fini de charger la voiture. J’ai été chercher Amélie à son bureau de la rue du Bac. Halte à Nuits-Saint-Georges dans un hôtel confortable mais sottement prétentieux, avec une clientèle d’étrangers à grosses berlines. Nous sommes attendus demain à Veyrier pour le déjeuner.

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